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Le projet

Notre chantier se penche sur une problématique majeure vécue par les Premières nations et les Inuits, celle de leur judiciarisation et prise en charge correctionnelle.  En effet, à l’heure actuelle, le Ministère de la sécurité publique et plus particulièrement la Direction des services correctionnels se trouvent confrontés à une présence statistiquement conséquente dans leurs services, de personnes issues de diverses nations autochtones, qu’il s’agisse des établissements de détention ou des ressources en milieu ouvert. Outre les nombreux enjeux associés à la prise en charge pénale des Autochtones, tels que la surreprésentation, le déracinement ou encore la vulnérabilisation, la question se pose quant aux formes d’intervention pouvant être mises en œuvre.

Basée sur une étroite collaboration entre divers représentants d’organismes communautaires autochtones, le ministère de la sécurité publique du Québec et l’équipe de chercheurs notre recherche a permis une collecte de données uniques sur les valeurs, la philosophie et les approches d’accompagnement favorisées par les Premières Nations et les Inuit. Nous avons ainsi recueilli les propos de 29 hommes judiciarisés en détention ou en suivi dans la communauté et de 23 Aînés / accompagnateurs autochtones travaillant en établissement carcéral ou en communauté.

Nos données mettent en lumière 4 constats. 

Le premier concerne la très grande vulnérabilité dans laquelle se retrouvent la plupart des justiciables autochtones :  ruptures, abandons, deuils et traumatismes personnels et intergénérationnels associés au lourd bagage historique marqué par les politiques d’assimilation et le colonialisme dont ont été victimes collectivement les Autochtones.

Le second constat porte sur l’importance de mieux préparer les justiciables à leur retour en communauté, en misant principalement sur le développement des compétences à la fois personnelles et relationnelles. Une réintégration sociale et communautaire réussie repose en grande partie sur la capacité pour les justiciables à se définir comme des acteurs à part entière, en mesure de déterminer eux-mêmes leur parcours de vie : estime de soi, fierté, sentiment d’accomplissement, prise du contrôle de sa vie et développement de sa capacité d’action.

Le troisième constat concerne le rôle joué par les intervenants et les accompagnateurs issus des communautés autochtones. Nombreux sont les participants à cette étude qui soulignent l’importance pour les justiciables de pouvoir rencontrer des Aînés, des intervenants issus des communautés autochtones ou des co-détenus autochtones, dans un contexte où domine l’écoute et l’absence de jugement. Dans ce cadre, le soutien offert par ces gardiens du savoir, mais aussi par les familles, les amis et, le cas échéant, la communauté, est essentiel. 

Enfin, un quatrième constat concerne la nécessité de mettre en place des thérapies et interventions qui permettent de panser les traumatismes et de favoriser la guérison. Il est alors nécessaire de développer des initiatives et des outils d’intervention qui soient culturellement ancrés dans les valeurs et les pratiques traditionnelles des Premières Nations et des Inuit, et d’aller plus loin et de façon plus complète qu’un programme « adapté », un traitement d’une problématique ciblée ou de « simples » sorties sur le territoire.

En nous inspirant de ces expériences, vécus, pratiques et représentations, notre recherche apporte une réflexion approfondie sur la nécessaire reconnaissance de la capacité d’autogestion des Premiers Peuples et la nécessaire reconnaissance des compétences, forces et savoirs des membres des Premières Nations et des Inuit dans la prise en charge des personnes accusées d’actes criminels.

Ce contenu a été mis à jour le 15 avril 2024 à 17h16.